04
avril 2008
Entre
1966 et 1968...
La
solitude et le silence de la maison étaient extrêmes. Dans une
pièce du "second", non encore aménagée, donnant sur la rue par
deux hautes portes-fenêtres; entre les malles retour du Congo
et une étagère remplie de vieux livres; entre les boîtes à outils
et les tables bancales, je m'étais installé un coin. Impossible
de me souvenir en quelle année j'avais fabriqué ce coin à jouer.
Etait-ce avant d'avoir ma propre chambre ? Sans doute.
J'avais une petite garde-robe pour mes vêtements de poupée avec
deux portes laquées blanc, ornées d'un bouquet champêtre. J'avais
un petit évier de cuisine avec un réservoir pour l'eau. J'avais
un service à dînette en porcelaine, et j'avais trois poupées.
Et une maison de poupées - que j'ai donnée à une de mes nièces.
Un service de casseroles - avec un couvercle bleu et un couvercle
vert. Et je jouais avec un petit fer à repasser, mais je ne me
souviens pas s'il était à moi ou non.
Tout en haut de la maison, sous le toit plat, à une époque où,
dans la rue, la circulation était calme, il faisait terriblement
froid et silencieux. Je regardais autour de moi et je me sentais
prisonnière de tant de silence. De temps en temps, j'abandonnais
mes poupées, dont je ne raffolais pas, et j'allais feuilleter
un livre dans la bibliothèque. Une "Semaine
de Suzette" ou, plus rarement, un des volumes
de la collection Nelson du "Capitaine Fracasse" de Théophile
Gautier.
Dans "La semaine de Suzette", quelles étaient mes histoires préférées?
"Le règne de Cendrillon", "Farfadette", "Les nouveaux Bohémiens",
"La pupille du Cardinal", et la "tétralogie" de Marguerite
Bourcet, "L'héritière de Ferlac", "L'étoile de Navailles",
et "Princesse de neige", suivi de "La romance d'autrefois".
J'oublie
"Le passager de la Belle-Aventure" et "Pâques Fleuries",
d'Eric de Cys. Qui me semblaient être un monument de modernité
ou d'humour à côté de ces autres titres.
Je
lisais d'autres livres, bien sûr, les romans de la collection
Souveraine, des éditions Rouge & Or, les livres de la bibliothèque
"Amitié, Histoire", la série des "Béatrice",
de Georges Chaulet (dont j'aimais particulièrement le premier
tome, "Une rapière pour Béatrice"... ) - De sorte que
si j'avais eu une fille, j'aurais aimé l'appeler Béatrice...
Mais
ce qui reste lié à ce souvenir de froid et de solitude, ce sont
les histoires de la Semaine de Suzette, que je lisais
en catimini, tant j'avais peur d'écorner ces vieux livres et de
me faire ' ramasser ' après.
From:
Les Carnets de Pivoine : http://pivoineblanche7.canalblog.com/
by kind permission of the author.
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